Reportage : Abidjan, Africa CEO Forum. Lundi matin, les couloirs feutrés du forum économique ont brièvement tremblé sous le poids d’une annonce politique : Bah Oury, Premier ministre guinéen, y a déclaré que les élections présidentielle et législatives se tiendront en décembre 2025. Un calendrier qui, s’il se veut rassurant, suscite déjà la controverse à Conakry.
Parmi les premières voix à s’élever, celle de FayaMillimono, président du Bloc Libéral. À travers les ondes de TV5 Monde, l’opposant a lancé un message sans détour à l’endroit du chef du gouvernement : « Il faut que nous soyons autour de la table pour qu’ensemble, nous définissions les choses en vue d’un retour apaisé à l’ordre constitutionnel. »
Dans son intervention, FayaMillimono ne cache ni sa frustration ni ses doutes quant à la sincérité de la démarche gouvernementale. Selon lui, les annonces faites à l’international, loin des réalités guinéennes, trahissent un mépris des forces vives nationales. « Au lieu de faire cela, on se promène dans les capitales africaines pour annoncer des choses. Parfois, c’est à Dubaï. Arrêtons cela. Les problèmes, c’est en Guinée qu’on va les résoudre. »
Un silence de plomb autour du dialogue
Derrière ce coup de gueule, c’est surtout l’absence de cadre de concertation nationale qui inquiète l’opposant. Depuis plus d’un an, note-t-il, aucun espace de dialogue formel n’a été rouvert entre la junte et les partis politiques, les syndicats ou encore la société civile. Un blocage qui, selon lui, fragilise la transition enclenchée depuis la chute du président Alpha Condé, le 5 septembre 2021.
« Depuis plus d’un an, il n’y a même pas une perspective de dialogue pour s’entendre sur les choses. Rien ne semble préoccuper ce gouvernement qui va faire des annonces à l’extérieur alors qu’à l’intérieur, rien ne se prête », déplore-t-il, visiblement agacé.
Une transition sous tension
Alors que la junte militaire, par la voix de son Premier ministre, tente de projeter une image de maîtrise et de retour progressif à la normalité institutionnelle, certains acteurs politiques voient surtout un manque de transparence et d’inclusivité.
Pour FayaMillimono, l’urgence n’est pas dans la fixation de dates, mais dans la construction d’un consensus national autour des règles du jeu. Sans cela, prévient-il, l’échéance de décembre 2025 pourrait bien devenir une nouvelle source d’instabilité.
Dans une Guinée en quête de repères, le dialogue semble être le seul chemin viable. Mais encore faut-il que le gouvernement accepte de s’y engager.
Algassimou L Diallo