Le mystère de l’or « disparu » : au cœur d’un scandale national
Conakry, jeudi 22 mai – Sous une chaleur pesante, les caméras s’installent, les micros s’ajustent. Dans la salle de presse de la Présidence guinéenne, les journalistes sont venus nombreux. Tous attendent une déclaration sur une affaire qui secoue les hautes sphères de l’État depuis plusieurs mois : la disparition présumée de quatre tonnes d’or de la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG).
Le silence du pouvoir, jusque-là pesant, est enfin brisé. Le général Amara Camara, ministre secrétaire général et porte-parole de la Présidence, prend la parole devant une salle tendue.
« Il y a eu beaucoup de vagues, de bruits, de spéculations, de diffamations… bien plus que ce qui s’est réellement passé sur le terrain », lance-t-il d’emblée, balayant d’un revers de main ce qu’il qualifie de “manipulations”.
Le ton est ferme. Le général veut reprendre le contrôle du récit. Selon lui, une grande partie de l’or serait déjà récupérée. Le reste ? Localisé, identifié. “On sait où ça se trouve, avec qui, et comment ça doit rentrer en Guinée”, martèle-t-il, visiblement agacé par ce qu’il perçoit comme une tentative d’instrumentalisation politique.
Derrière l’or, les permis
Mais ce scandale met en lumière un autre volet : la gestion opaque des permis miniers. Une brèche que le porte-parole n’a pas esquivée.
“La commission des mines statue sur l’attribution ou le retrait des permis. C’est un outil de décision à la disposition du ministre des Mines”, explique-t-il, rappelant la chaîne de commandement dans le secteur aurifère.
Ce rappel institutionnel vise à rassurer, mais il soulève aussi des interrogations. Qui a réellement autorisé les transactions ? Sur quelle base ? Et surtout : pourquoi un tel flou autour d’une matière aussi stratégique que l’or ?
Des zones d’ombre qui persistent
Si le général Amara Camara tente de minimiser l’ampleur de l’affaire, une partie de l’opinion publique reste sceptique. Depuis les premières révélations, des voix s’élèvent pour exiger plus de transparence sur les circuits de commercialisation de l’or, les acteurs impliqués et les responsabilités au sein même de la Banque centrale.
Dans les rues de Conakry, le sujet divise. Certains croient à la version officielle ; d’autres y voient l’arbre qui cache une forêt de malversations plus vastes.
“Nous n’allons pas répondre à tous les bruits”
Face aux critiques, la réponse du pouvoir est sans détour : la priorité est à la gestion, pas à la polémique.
“Nous n’allons pas répondre à tous les bruits au sein de la société parce que quelqu’un voudrait juste se faire entendre”, tranche le général, avant de promettre que “les solutions seront apportées chaque jour”.
Mais cette promesse suffira-t-elle à apaiser les doutes ? L’opacité qui entoure encore cette affaire laisse une impression tenace : celle d’un État pris entre sa volonté d’afficher la transparence et la réalité d’un secteur aurifère longtemps miné par les intérêts croisés.
Un dossier à suivre… de très près.
Abdoul Chaolis Diallo