Conakry, 3 mai 2025 – Le silence est pesant dans les studios désertés de plusieurs radios de la capitale. Ce 3 mai, censé célébrer la liberté de la presse dans le monde, a des allures de deuil professionnel pour nombre de journalistes guinéens. Pas de micros allumés, pas de flashs d’information. Juste des locaux fermés, du matériel scellé, et des voix condamnées au silence.
Dans une salle poussiéreuse, quelque part à Kipé, d’anciens employés de FIM FM se retrouvent autour d’un café amer. “C’était ici que je faisais mes revues de presse. Aujourd’hui, je n’ai même plus accès à mon micro”, confie, amer, un ancien chroniqueur. Depuis le retrait de leur agrément par les autorités de transition, lui et des centaines d’autres ont rejoint les rangs des invisibles : sans emploi, sans plateforme, sans recours.
Cellou Dalein Diallo monte au créneau
Pendant ce temps, sur ses réseaux sociaux, l’opposant politique Cellou Dalein Diallo lâche un coup de tonnerre. Dans une déclaration ferme, il dénonce “le musellement méthodique de la presse”, qu’il décrit comme une stratégie bien huilée de la junte pour faire taire toute dissidence.
“La fermeture des médias, les coupures d’internet, les enlèvements de journalistes, ce n’est pas du hasard”, martèle-t-il. “C’est un programme politique assumé pour préparer la confiscation du pouvoir.”
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le dernier rapport de Reporters sans frontières fait état d’un recul brutal de la liberté de la presse en Guinée. Et la Haute Autorité de la Communication, censée garantir l’indépendance des médias, est aujourd’hui perçue par beaucoup comme une arme entre les mains du régime.
Un monde nouveau, une liberté ancienne menacée
Ironie cruelle : cette année, le thème choisi par l’UNESCO pour la Journée mondiale est « Informer dans un monde nouveau – L’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse ». En Guinée, ce n’est pas encore l’IA qui inquiète. Ce sont les hommes en uniforme.
Cellou Dalein appelle à une mobilisation citoyenne : journalistes, auditeurs, militants de la liberté d’expression. “Le silence est une complicité. Se taire aujourd’hui, c’est enterrer la démocratie demain.”
Dans les rues de Kaloum, des jeunes fixent leurs téléphones éteints. La connexion est encore coupée. Une autre forme de censure, plus sournoise. Pendant ce temps, les studios de Djoma TV, Espace FM et FIM restent vides. Pas de lumière rouge. Pas de journal de midi. Juste une longue attente.
Alpha Amadou Diallo